Été 1992, l’affaire Claude Morin bat son plein et tout le Québec est sous le choc de savoir qu’un souverainiste pur et dur aurait collaboré avec la GRC. L’animateur André Arthur spécule sur qui a fait couler l’info auprès du journaliste qui l’a publiée. J’appelle à la ligne ouverte et je dis que c’est la GRC qui a fait fuiter l’info. Arthur me répond : « Vous écoutez trop de films de James Bond » et il me raccroche au nez. Le jour suivant, le journaliste confirme ma théorie.
Y’a rien comme une agence gouvernementale pour lancer de la marde dans le fan.
Hier soir avait lieu le discours de Donald Trump devant le Congrès. Dans son lot de bravades, de mensonges et de grossières inexactitudes, deux informations que j’avais déjà entendues ont retenu mon attention: les dizaines de millions octroyés au Mozambique pour encourager la circoncision des hommes et la distribution massive de préservatifs. Les montants sont impressionnants : 10 et 50 millions. La circoncision contribue à diminuer la transmission de virus dont le VIH de femmes à hommes et les préservatifs ont la même mission des deux côtés.
Tout ce bel argent vient de la USAID, organisation d’aide internationale américaine qui a son nez fourré un peu partout sur la planète. Le DOGE d’Elon Musk et Donald Trump se demandent pourquoi les USA financent autant de programmes à l’extérieur des frontières, rendant la chose d’autant plus inacceptable dans le cadre d’un gouvernement qui fait la promotion de l’Amérique d’abord.
Justement, dans bien des cas, USAID, c’est l’Amérique d’abord.
Quand on s’informe sur le Mozambique, on découvre un pays rongé par la corruption avec des despotes au pouvoir, arraché au prix d’élections à la légitimité douteuse. Un pays où 54% de la population vit sous le seuil de la pauvreté, où il n’y a qu’un seul professionnel de la santé par 10 000 habitants. Un pays qui a souffert d’une guerre civile de 16 ans, visant à éradiquer le régime marxiste-léniniste qui était en place. Ça a fonctionné au prix de dizaines de milliers de morts.
Aujourd’hui, il y a de l’argent en masse qui circule au Mozambique. Il y a du tourisme, des minerais, du tabac et surtout, un énorme potentiel pour l’exploitation de gaz naturel liquéfié. Les joueurs impliqués : Exxon Mobil, TotalEnergies et la Banque américaine d’import-export qui s’est commise à un prêt de 4,7 milliards pour le développement du projet. La Corporation du développement financier des USA a même étendu une assurance de 1,5 milliard en couverture de risque auprès d’Exxon Mobil. La somme totale des investissements constitue les plus grands faits par les USA dans un pays d’Afrique.
Et puis, toujours scandalisés par les 10 millions en coupes de prépuces?
Reste à savoir si c’est vraiment ça que ça coûte ou si une grande partie de ces fonds sont tout simplement détournés dans les poches des dirigeants et de leur famille. Quoi qu’il en soit, même si ça coutait ça, c’est 60 millions de dollars que le gouvernement du Mozambique n’a pas à dépenser. Mais de la part d’un état aussi corrompu que le soleil se lève, permettez-moi d’en douter.
De plus, ce matin, la Cour Suprême des USA a refusé que le gouvernement gèle son aide à ces pays en voie de développement, une rebuffade à Trump mais un geste conséquent face à l’impérialisme américain et son écosystème qu’il peaufine depuis des décennies voire plus d’un siècle, sur l’échiquier mondial. En cessant leur aide internationale, les USA, ouvrent la porte à d’autre partenaires tels la Russie, l’Inde et la Chine, pays qui rêvent de prendre la place de l’oncle Sam auprès de ces pays pauvres-riches dans cette fataliste équation.
USAID prend presque des airs de société-écran pour acheminer de « l’aide » à des pays à la démocratie chancelante mais aux ressources naturelles extraordinaires.
Pourquoi alors ne pas laisser ces états se développer une économie prospère en gérant eux-mêmes leurs ressources et enfin sortir de la pauvreté?
T’as pas compris, Dan.
C’est l’Amérique d’abord !